- ENTÉROVIRUS
- ENTÉROVIRUSLes entérovirus constituent un groupe de virus résistant aux agents extérieurs, très répandus dans la nature et se reproduisant dans l’intestin de l’homme. On y classe d’une part l’agent de la poliomyélite, d’autre part les virus Coxsackie et ECHO, qui peuvent donner des maladies diverses, dont les principales sont la myalgie épidémique, les méningites lymphocytaires bénignes et la grippe estivale. L’étude approfondie des propriétés du virus de l’hépatite A a permis de classer cet agent dans le groupe des entérovirus (entérovirus 72). Leur épidémiologie commune s’explique par leurs caractéristiques physico-chimiques et biologiques. Il existe seulement des entérovirus chez de nombreuses espèces animales.Le groupe des rhinovirus, voisins des entérovirus, constitue avec ceux-ci la famille des Picornaviridæ .Les différents agentsDepuis quelques décennies, les progrès accomplis dans les méthodes d’étude et la connaissance des virus ont abouti à la découverte d’un certain nombre d’agents nouveaux, qu’on a pu isoler chez l’homme en diverses circonstances. Alors que pour certains d’entre eux il a été facile de trouver une relation avec une maladie caractérisée, pour d’autres au contraire le pouvoir pathogène n’était pas évident et l’on pouvait discuter de la signification de leur présence dans l’organisme humain.Cependant l’étude de ces nouveaux virus révélait un ensemble de propriétés qui permettaient de les classer en différente familles, d’abord suivant des critères indirects, puis au fur et à mesure des progrès de la technique, suivant des caractères de plus en plus précis.C’est en 1956, surtout à la suite des travaux des chercheurs américains concernant la maladie poliomyélitique et les affections voisines, qu’on a pu définir un groupe assez homogène de virus: ces agents se multipliaient dans le tube digestif de l’homme, pouvaient dans certains cas atteindre le système nerveux central, et, en raison de leurs caractéristiques physico-chimiques, partageaient un certain nombre de propriétés épidémiologiques. Enfin, ces virus étaient pour la plupart cultivables en cultures cellulaires de rein de singe.Cette famille d’agents, à qui l’on a donné alors le nom d’entérovirus, s’est trouvée constituée des catégories de virus suivantes:– d’une part, le virus poliomyélitique, avec ses trois types sérologiques [cf. POLIOMYÉLITE];– d’autre part, les virus dits « Coxsackie », avec les deux groupes A et B, découverts antérieurement par isolement sur le souriceau nouveau-né, ces virus pouvant donner à l’homme un certain nombre de maladies;– enfin d’autres virus entériques , cytopathogènes (c’est-à-dire pathogènes pour les cellules en culture), humains , ne correspondant pas, au moins à l’origine, à une maladie humaine définie. Ces agents, d’abord dénommés plaisamment par Duran-Reynals «orphelins» (en anglais: Orphan ), ce qui faisait allusion au fait qu’on ignorait leur maladie mère, ont reçu le nom de virus ECHO, sigle constitué des initiales des quatre qualificatifs ci-dessus mentionnés. Cependant les derniers types isolés n’ont pas été classés sous ce vocable et sont simplement désignés par le terme Entérovirus, suivi d’un numéro (de 68 à 71).On envisagera les virus Coxsackie, puis les virus ECHO; ensuite, on regroupera en quelques lignes les propriétés actuellement connues de l’ensemble des entérovirus. Le virus de l’hépatite A sera étudié ailleurs [cf. FOIE].Virus CoxsackieEn 1948, aux États-Unis, Dalldorf et Sickles découvrent, dans les fèces de deux enfants atteints d’affections paralytiques, un virus distinct du virus poliomyélitique, car inoffensif pour le singe, mais au contraire pathogène pour le souriceau nouveau-né. Dénommé virus Coxsackie, du nom du village où habitaient ces malades, cet agent conférait au souriceau une paralysie avec lésion du système musculaire.L’année suivante, en Nouvelle-Angleterre, Melnick et ses collaborateurs découvraient un virus analogue, mais se distinguant du premier par le type des lésions données au souriceau d’expérience (lésions du système nerveux central, du cœur, etc.). Ainsi est née la distinction entre deux groupes différents de virus Coxsackie, le groupe A (type Dalldorf) et le groupe B (type Melnick).Rapidement ces virus ont été retrouvés dans divers pays du monde, notamment en France (Lépine). On pouvait les isoler chez des malades atteints de plusieurs sortes d’affections:– la myalgie épidémique ou pleurodynie: affection connue depuis longtemps et étudiée en particulier dans l’île danoise de Bornholm en 1930 par Sylvest; c’est une affection fébrile avec douleurs musculaires; son évolution est généralement bénigne;– des atteintes du cœur: myocardites aiguës, plus rarement péricardites , parfois secondaires à une myalgie épidémique (la myocardite du nouveau-né et du nourrisson, heureusement rare, est une affection grave);– des affections du système nerveux: avant tout méningites lymphocytaires , d’allure épidémique ou en cas isolés, à évolution favorable dans tous les cas, et parfois paralysies, mais qui guérissent généralement sans séquelles;– des maladies respiratoires: simple rhume , le plus souvent, ou pharyngite vésiculeuse avec température élevée et dysphagie marquée («herpangina» de Zahorsky);– des affections fébriles sans signe de localisation, survenant plutôt dans la belle saison, d’où le nom de grippes estivales.Les caractéristiques générales des virus Coxsackie sont celles des entérovirus, décrites ci-dessous; il en est de même pour les propriétés épidémiologiques. Précisons seulement que les virus du groupe A (23 types sérologiques) s’isolent mal en cultures cellulaires et qu’aujourd’hui encore on les étudie sur le souriceau nouveau-né; au contraire, les virus du groupe B (6 types sérologiques) croissent facilement en cultures cellulaires, celles de rein de singe en particulier. Le diagnostic de laboratoire se fait par les procédés d’isolement évoqués ci-dessus et par la sérologie, qui nécessite l’examen de deux échantillons de sang du malade, l’un précoce, prélevé le plus tôt possible au début de l’affection, l’autre tardif, prélevé dix à quinze jours après le premier.Virus ECHOComme pour les virus Coxsackie, ce sont les recherches systématiques sur les virus présents dans les matières fécales humaines qui ont amené la découverte de ces agents. Non pathogènes pour l’animal d’expérience, à quelques exceptions près, on les isole uniquement par inoculation de cultures cellulaires (rein de singe en principe). Ils ne sont pas responsables de maladies humaines bien caractérisées, comme la poliomyélite ou la myalgie épidémique; cependant on a pu, en maintes occasions, prouver qu’ils étaient à l’origine de certaines affections qui peuvent prendre une allure épidémique:– des affections du système nerveux: les méningites lymphocytaires ne sont pas rares; elles procèdent souvent par épidémies, et là encore sont de bon pronostic; des syndromes paralytiques ont parfois été décrits;– des affections du type grippe estivale , avec ou sans apparition d’une éruption ressemblant à celle de la rougeole ou de la rubéole;– chez le nourrisson, des gastro-entérites épidémiques.En réalité, des études systématiques, réalisées en particulier dans les collectivités d’enfants (crèches, hôpitaux), montrent que la très grande majorité des virus ECHO isolés du contenu intestinal sont pratiquement dépourvus de pouvoir pathogène.Le diagnostic de laboratoire se fait par l’isolement du virus en cultures cellulaires; il n’existe pas moins de trente-six types sérologiques différents, ce qui rend la détermination parfois malaisée. La sérologie est également peu utile, sauf en cas d’épidémie caractérisée.Caractéristiques générales des entérovirusÀ la lumière des recherches récentes effectuées dans ce domaine au moyen de la microscopie électronique, des études cytochimiques, etc., on peut définir les entérovirus par trois caractéristiques fondamentales: ce sont des virus à acide ribonucléique (ARN); leur taille est faible, de l’ordre de 28 nanomètres; ils résistent à l’action de l’éther et du désoxycholate de sodium, ainsi qu’à d’autres agents physiques ou chimiques.On sait en outre qu’ils sont dépourvus d’enveloppe et que leur particule est du type de symétrie cubique, l’ARN étant enfermé dans une capside constituée de trente-deux capsomères.Leur caractère de résistance générale aux agents physico-chimiques conditionne l’épidémiologie des affections qu’ils causent. Étant éliminés en grande quantité par l’intestin des sujets et persistant dans les eaux usées, ces virus sont très répandus dans la nature. La contamination se fait par voie digestive, par l’eau ou les aliments contaminés. Il faut noter que la plupart des sujets qui s’infectent ainsi deviennent porteurs de virus et contribuent à sa dissémination, mais que, le plus souvent, ils font une infection entièrement inapparente, les formes cliniques étant l’exception. On a déjà signalé la plus grande fréquence en saison chaude; en outre, ces virus sont d’autant plus répandus que l’hygiène de la population est moins développée.Signalons qu’il existe également des entérovirus chez de nombreuses espèces animales: singes, bovins, porcins, chiens, chats, oiseaux; leurs propriétés sont voisines de celles des entérovirus humains.RhinovirusDes recherches systématiques, effectuées sur les agents pathogènes des maladies respiratoires aiguës, coryzas ou «rhumes de cerveau», ont abouti entre autres choses à l’isolement d’un groupe particulier de virus, apparentés d’assez près aux entérovirus, et qui, en raison de leur habitat naso-pharyngé, ont été nommés «rhinovirus». Ce sont eux qui causent un certain nombre de rhumes banals.Ces agents, qui se divisent en un grand nombre de types sérologiques, possèdent les propriétés essentielles des entérovirus: taille, acide ribonucléique, résistance à l’éther et au désoxycholate; en outre, ils sont sensibles aux acides. On les isole en cultures cellulaires humaines ou de singe.L’ensemble des entérovirus et des rhinovirus constitue la famille des Picornaviridæ (petits virus à ARN).entérovirus [ɑ̃teʀoviʀys] n. m. invar.ÉTYM. Mil. XXe; de entéro-, et virus.❖♦ Méd., biol. Groupe de virus, qui s'établissent dans le tube digestif (⇒ Poliovirus). || « L'agent de l'hépatite A est un petit virus à ARN mesurant 27 nm (nanomètres) de diamètre (…) Il possède toutes les caractéristiques des entérovirus. Son enveloppe est formée de quatre chaînes polypeptidiques distinctes. Ce virus est assez résistant » (la Recherche, no 145, juin 1983, p. 863).
Encyclopédie Universelle. 2012.